Traam 2019 : des organigrammes pour mieux comprendre la régulation de la glycémie
Auteure : Marion Untereiner
NB : cet article fait partie d'un ensemble d'articles synthétisant les travaux de l'académie de Strasbourg, dans le cadre des Travaux Académiques Mutualisés sur la thématique des algorithmes et du codage dans l'enseignement des SVT. Vous pouvez retrouver l'article principal faisant la synthèse de nos travaux en cliquant ici.
Bien souvent au lycée nous constatons les difficultés qu’ont nos élèves à différencier clairement les origines/causes d’un phénomène de leur(s) conséquence(s) et ce à tous les niveaux. Or cela impacte parfois lourdement leur capacité à établir des raisonnements pertinents et/ou des démarches rigoureuses et efficaces. Malgré les multiples explications, approches différenciées certains élèves ne parviennent pas à clarifier cela. Le cas d’une régulation en physiologie en est un parfait exemple. Les élèves en question peinent à définir le rôle de chaque acteur et leur(s) action(s), surtout si elles sont contextuelles.
C’est pourquoi tester une représentation par organigramme de programmation dans le cas de la régulation de la glycémie paraissait opportun pour identifier l’éventuel plus-value à ce sujet.
1. La place dans les programmes
- Enseignement de spécialité : Thème 3 "Corps humain et santé"
- Notions abordées : " La glycémie est un paramètre du milieu intérieur. Son maintien par l'organisme dans une gamme de valeurs étroite est un indicateur et une condition de bonne santé. La régulation de la glycémie repose notamment sur les hormones pancréatiques : insuline et glucagon. "
2. Préparation de la séquence
L’ensemble des acteurs de la régulation de la glycémie avaient été mis en évidences par différentes études de cas cliniques et TP au cours des semaines précédentes. Pour chaque acteur avait été identifié un rôle dans le système de régulation notamment par l’analogie avec un système d’homéostat, tel que le bain-marie. Afin de synthétiser l’ensemble de ces données et surtout de les connecter entre-elles, il ne restait qu’à réaliser un schéma bilan de ce système de régulation en prévision de l’étude des diabètes.
Ce qu’il a fallu clarifier tout d’abord c’étaient les acquis de ces élèves à ce sujet. Après échanges avec les collègues de mathématiques, il s’est avéré que ce type de représentation n’était pas obligatoire et de ce fait les élèves pouvaient ou non les connaître. Puis il a fallu convenir des pictogrammes à utiliser. Une rapide recherche sur les conventions utilisées au collège, en technologie notamment, montra des convergences sur certains figurés (notamment les conditions) mais quand même une certaine latitude dans l’ensemble. Le choix se porta sur les figurés les plus fréquents :
Pour terminer il fallut décider de la manière d’aborder cela lors de la séance (travail en autonomie individuel ? en groupe ? une construction collective par l’ensemble de la classe ? travail maison ?).
Le choix s’est porté sur une brève présentation du concept à partir de deux exemples simples (l’habitabilité d’une planète et le fonctionnement d’un feu tricolore) un travail en autonomie individuel dans un premier temps puis une construction collective en guise de mise au point.
3. Mise en oeuvre
Après une brève introduction (5min) sur la logique de cette approche et les orientation post-bac (comme la bio-informatique par exemple) j’ai proposé aux élèves une explication sur la réalisation et l’utilité d’un organigramme de programmation, les conventions de représentation et enfin deux exemples (l’un « classique » : le fonctionnement d’un feu tricolore ; l’autre plus appliqué aux SVT : établir l’habitabilité d’une planète, grâce au travail préalable de Lorelÿ Decina).
Une fois cette introduction faite, j’ai demandé aux élèves de réaliser leur propre organigramme à l’aide de leur cours/TP/TD et de mon assistance.
Des groupes de deux-trois élèves se sont spontanément formés et la réflexion a très vite démarré. Dès le départ ils ont cherché « par où » rentrer dans le « programme » et « par où » en sortir. Puis la recherche s’est poursuivie sur les commandes à réaliser et les éventuelles entrée/sortie. Lors de ces étapes chaque groupe m’a interpellé au moins une fois lorsque je circulais afin de vérifier la cohérence de leur proposition ou pour clarifier l’une ou l’autre étape de la régulation de la glycémie.
Étant donné la nouveauté de ce type d’approche, pour les élèves comme pour moi, j’ai fait le choix de laisser les élèves en autonomie une bonne vingtaine de minutes voire plus afin de leur laisser le temps de rentrer à leur rythme dans ce type de production (sur un créneau total de 2 heures).
Vu la productivité des élèves et surtout la multiplicité des réponses (je ne pensais pas avoir autant de propositions différentes) j’ai décidé en guise de bilan de mettre en parallèle ma proposition et celles d’élèves en insistant bien sur le fait qu’il n’y avait pas une bonne réponse, mais différentes propositions cohérentes.
4. Bilan et retours.
- L'enseignant
L’engouement fut faible lors de l’introduction mais le lien avec l’orientation, notamment par la bioinformatique et toutes les applications possibles dans leurs futurs parcours post-bac, a suscité l’intérêt.
Lors de la réalisation, sur 20 élèves au total, seuls trois élèves n’ont pas réussi à produire un organigramme (difficulté d’appropriation du vocabulaire, problème de projection entre l’organigramme et un schéma bilan, liés notamment à des difficultés initiales dans la maîtrise du cours). Je leur ai fourni le schéma bilan déjà réalisé (version « classique »), et je leur ai demandé après l’avoir analysé de tenter cette fois-ci d’en faire un organigramme. Le travail a pu cette fois-ci être réalisé. Concernant les 17 élèves qui en ont produit un sans assistance particulière : la plupart étaient très motivés et certains d’entre eux ont par ailleurs fait d’excellentes choses (cf. figures 4 et 5).
La majorité d’entre eux ont dû s’y prendre à deux fois car le premier jet était confus en termes de fin : on sortait du programme si la glycémie revenait à la valeur consigne sinon on reprenait du début par une boucle sans fin. Après avoir soulevé ce problème certains ont eu la bonne idée de faire une seconde sortie de programme par l’état « trouble de la régulation de la glycémie ».
Cette approche a favorisé la proximité avec les élèves (on est plus ou moins au même niveau en termes d’expérience dans ce domaine), le travail de raisonnement, de test de cohérence dans la suite de commandes et la réflexion sur le mécanisme dans sa globalité « d’où je pars, où je vais » fut bénéfique dans l’appropriation du schéma bilan et la maîtrise de cette notion.
En termes de gestion il est primordial d’arriver avec au moins une proposition testée, idéalement deux pour les élèves avec une logique différentes de la nôtre, qui ne rentreraient pas dans ce que l’on propose. Mais à l’inverse il faut rester ouvert à leur proposition qui, de prime abord, peuvent sembler peu structurées voire erronées alors qu’en y regardant de plus près, elles peuvent être cohérentes, elles sont de plus très révélatrices de leur façon de raisonner.
Je pense que l’introduction sur la « base des organigrammes » fut nécessaire et leur a permis de vite être en autonomie (plus vite que ce que j’avais estimé).
Il faut veiller à prévoir une autre approche pour ceux à qui les organigrammes ne correspondraient pas du tout (ici ce fut une très petite minorité d’élève).
- Les élèves
Ils ont apprécié la nouveauté de ce type de travail et aussi l’aspect collaboratif (notamment le fait de se confronter à la logique de leur camarade qui n’est pas toujours la leur) et il y a eu des débats vifs et très constructifs chez certains. Pour certains cela a même soulevé et à la fois résolu des incompréhensions de certains aspects de cette régulation (l’insuline qui est hypoglycémiante mais qui est sécrétée en cas d’hyperglycémie par exemple).
Deux élèves m’ont signifié préférer ce type de présentation car je cite : « c’est plus lisible et logique ».
Les trois élèves qui ont abordé le travail dans l’autre sens ont aussi mieux cerné le mécanisme dans son ensemble mais je pense qu’ils préféreront travailler sur la version « classique » (je pense qu’il y a eu une forme de rejet par une trop grande similarité avec les mathématiques qui sont leur point faible).