Traam 2019 : modéliser le débit ventilatoire
Auteure : Lorely Decina
NB : cet article fait partie d'un ensemble d'articles synthétisant les travaux de l'académie de Strasbourg, dans le cadre des Travaux Académiques Mutualisés sur la thématique des algorithmes et du codage dans l'enseignement des SVT. Vous pouvez retrouver l'article principal faisant la synthèse de nos travaux en cliquant ici.
1. Les motivations pour tester cette approche.
Il s’agit du premier travail incluant de la programmation que j’ai proposé dans mes classes de seconde. L’usage de la programmation parait tout à fait adapté dans toutes les relations qu’il est possible de calculer. Ces tâches calculatoires déplaisent souvent aux élèves d’une part, et d’autre part ces derniers ont souvent du mal à raisonner en termes d’évolution d’une variable : ils se cantonnent au résultat unique d’un calcul et ont donc tendance à traiter les données comme s’il s’agissait de variables discrètes et non continues.
2. Réflexions menées lors de la préparation.
La conception de l’animation demande un investissement important de la part de l’enseignant, ou au moins d’être familier des concepts de base de la programmation. Néanmoins cela reste tout de même accessible, m’étant formée pour ma part de manière autonome en utilisant des ouvrages destinés aux enfants qui sont de plus en plus nombreux et présentent des exemples concrets, ludiques et abordables pour nos élèves.
3. La mise en œuvre en classe.
Utilisation au tableau de l’animation crée : les curseurs permettent de modifier la fréquence ventilatoire et le volume courant, le calcul du débit s’affiche, les poumons sont animés de manière à correspondre aux paramètres imposés, ce qui permet de visualiser ce que sont la fréquence ventilatoire et le volume courant.
Les élèves ont pour tâche de comprendre l’effet des variations effectuées sur le débit ventilatoire. Ils doivent aussi préciser quelle est la relation entre fréquence, volume et débit.
Une fois ce travail effectué, les élèves vont récupérer le programme incomplet permettant de faire fonctionner l’animation et vont devoir compléter les parties manquantes. Plusieurs niveaux de difficulté sont proposés.
Sans aide : l’élève doit compléter le calcul du débit ventilatoire et intégrer ces variables de manière à ce qu’elles animent correctement l’animation, en essayant de s’approcher le plus possible de la réalité, notamment pour la fréquence ventilatoire.
Démarche aidée : L’élève n’a plus qu’à placer les variables aux bons endroits, l’ajustement de l’animation étant déjà effectué.
Programme complété :
4. Retours sur cette séquence.
a. Du point de vue de l’enseignant.
L’animation est un outil qui reste utilisable en lui-même sans qu’il ne soit nécessaire de s’intéresser à sa programmation. Cela permet de créer un réel lien avec la progression du cours et de ne pas amener une activité de programmation de manière trop artificielle et déconnectée du reste du travail effectué. Il est facile d’adapter le temps passé sur la partie programmation à chaque groupe d’élève en fonction de leur motivation pour cette tâche ou de leurs facilités de travail.
Ayant conscience que résoudre l’ensemble du programme pouvait être difficile pour certains, ou que d’autres n’aiment pas du tout la programmation, j’avais préparé en parallèle un travail documentaire sur l’effet du tabac sur la VO2 que j’ai donné aux élèves qui ne souhaitaient pas travailler longtemps sur la partie programmation, tandis que d’autres ont préféré passer beaucoup plus de temps sur cette activité.
On peut considérer alors qu’il est indispensable de différencier les activités mettant en jeu de la programmation afin de ne contraindre personne. Mais la différenciation ne doit pas être vue uniquement comme une conséquence découlant de la programmation : la programmation en elle-même est une nouvelle manière d’apporter de la différenciation dans son cours et ainsi de varier les activités proposées aux élèves.
La programmation par bloc, comme c’est le cas avec Scratch, s’est révélée être un nouvel outil pour moi pour comprendre le raisonnement de mes élèves et leur manière de répondre à une question ou à une demande de l’enseignant : j’ai pu remarquer que plusieurs élèves bouchent les trous du programme avec ce qu’ils ont à disposition, sans élaborer de stratégie de résolution. J’ai réalisé qu’ils utilisent aussi majoritairement ce mode opératoire lorsqu’on leur pose une question à l’oral : les propositions fusent, mais ne sont constituées que de mots isolés proposés hasardeusement jusqu’à ce que je valide. L’interface visuelle de Scratch et la facilité de déplacer les blocs permet une communication plus claire avec l’élève : il est possible d’attirer son attention sur un point précis et de le guider dans la réflexion qu’il doit développer.
Les élèves plus à l’aise ayant souhaité travailler avec la version difficile ont réussi à faire fonctionner le programme de la même manière que le mien, mais en utilisant un raisonnement et des solutions différentes. La programmation offre cette liberté à l’élève de ne pas être à la recherche de la solution mais d’une solution. Tandis que pour ma part j’ai utilisé le calcul pour faire correspondre la fréquence ventilatoire avec la vitesse de l’animation, les élèves ont procédé par essai erreur ou même plutôt par essai et ajustement : en effet, dans ce type d’activité, l’élève n’a pas le sentiment de commettre une erreur lorsqu’il ne trouve pas la bonne solution du premier coup. Les essais font partie intégrante du processus de résolution et deviennent un moyen d’arriver à la solution. Cet aspect contribue pour beaucoup à la motivation de certains pour ce type d’approche.
b. Du point de vue de l’élève
Scratch suscite de l’enthousiasme de la part d’une bonne partie des élèves qui ont déjà pu travailler avec au collège. Visiblement l’aspect ludique est toujours présent pour eux et ceux qui appréciaient ce type d’activité ne semblent pas s’en lasser.
Une part importante d’élèves cependant ne partage pas cet enthousiasme. Pour certains, c’est parce qu’ils ne connaissent pas bien cet outil. En général ils sont plutôt volontaires pour essayer mais sont souvent démotivés en voyant les élèves plus à l’aise et ont le sentiment que ça n’est pas pour eux.
D’autres élèves n’ont aucune affinité avec la programmation, n’apprécient pas cette méthode de travail et sont d’autant plus réfractaires qu’ils ont l’impression d’en faire tout le temps. « Est-ce qu’on va finir par programmer en cours de Français ? » a répondu un de mes élèves à un sondage sur leur ressenti sur ces séances.
Il est donc important d’utiliser cet outil avec parcimonie car si les aspects positifs sont nombreux, il ne constitue pour autant pas une solution qui conviendra à tous les élèves ni à tous les enseignants. Il m’a paru important au cours de cette expérimentation de toujours laisser une porte de sortie aux élèves réfractaires et de veiller à ce que l’entrain des passionnés ne monopolise pas le temps de classe. Pour ces derniers il est possible de leur donner des challenges à réaliser hors du temps de classe : certains de mes élèves l’ont fait d’eux-mêmes puisque je publie mes animations sur le site de Scratch, ce qui permet aux autres utilisateurs de les récupérer et de les « remixer » en modifiant le programme.
5. Ressources
Un exemple de l'animation est disponible ici : https://scratch.mit.edu/